QUELQUES POINTS DE VUE D’ACTEURS IMPORTANTS
Entre sécurité des citoyens et libertés individuelles, l’application TousAntiCovid se retrouve au cœur des discussions et divise la société.
Associations, entités gouvernementales ou établissements publics, divers acteurs entrent en jeu dans cette controverse et viennent nourrir le débat en mettant en avant leurs arguments, pour ou contre le déploiement de cette application.
Vous retrouverez alors ci-dessous une liste non exhaustive des différents acteurs et leurs arguments clés.
Santé publique France : TousAntiCovid, nécessité sanitaire

Santé publique France se place en tant qu’acteur majeur dans la mise en place de l’application TousAntiCovid en apportant des éléments de paramétrage. Sa mission est d’améliorer et protéger la santé des populations.
En étroite collaboration avec le ministère de la Santé et des solidarités, une campagne d’information auprès de la population pour promouvoir le téléchargement de TousAntiCovid a été réalisée et diffusée depuis 2020.
Pour Santé publique France, c’est la santé avant tout !
La menace que représente la Covid-19, pour la population, justifie la mise en place d’une application de contact tracing. L’argument principal avancé par Santé publique France est donc : TousAntiCovid vient protéger la santé des individus en leur évitant d’être contaminés. Elle permet de prévenir le développement de l’épidémie en brisant les chaînes de transmission, d’identifier rapidement les personnes ayant été en contact avec les personnes positives.
Comment ? En alertant et en se faisant alerter !
Pour Santé publique France, TousAntiCovid est donc un moyen efficace de lutte contre la pandémie.
Le numérique : Une solution nécessaire dans une société ultra connectée !
Dans le contexte d’une crise sanitaire d’une telle ampleur, il faut saisir tous les moyens mis à disposition pour lutter contre celle-ci. Passer à côté du numérique serait donc une erreur.
Pourquoi ?
Omniprésent dans le quotidien des français, le numérique constitue un moyen efficace pour lutter contre les chaînes de transmission car une grande partie de la population possède un smartphone. La mise en place de l’application TousAntiCovid apparaît donc comme une solution adaptée à la situation sanitaire.
Pour Santé publique France, le numérique vient toutefois en complément d’autres actions pour prévenir la pandémie.
Santé publique France participe activement à la stratégie gouvernementale et joue un rôle majeur, notamment dans l’appui au développement des outils de lutte contre la propagation du virus.
Conseil scientifique : TousAntiCovid & données personnelles
A l’origine de nombreuses décisions majeures quant à la crise sanitaire, les 17 membres du conseil scientifique de la Covid-19 se prononcent en faveur de l’application TousAntiCovid.
Ils confortent ainsi les pouvoirs publics à la mise en place et au maintien de l’application. Le conseil scientifique vient légitimer et crédibiliser la parole du gouvernement s’agissant de l’efficacité de ce dispositif.

TousAntiCovid : bouclier contre le virus
Pour le conseil scientifique de la Covid-19, l’application est un instrument complémentaire et essentiel pour lutter contre la pandémie.
TousAntiCovid permettrait de retracer les chaînes de contamination notamment lorsque la circulation du virus est élevée.
L’application qui respecte les données personnelles !
Cet outil qui a vocation à endiguer la pandémie, protège également les données personnelles des citoyens.
Le conseil scientifique recommande ainsi fortement l’utilisation de celle-ci car elle permet de “ne pas montrer toutes les données personnelles quand on produit son certificat”.
L’utilisation du format numérique permet à l’utilisateur de ne pas voir certaines informations et données médicales le concernant et en particulier la source d’obtention du pass sanitaire. L’utilisation et la communication du format papier à un tiers ne permet pas de masquer des données personnelles et médicales, que le contrôleur du pass sanitaire n’a pas à connaître.
CNIL : le respect des données avant tout

Dans le cadre de l’application TousAntiCovid, la CNIL joue son rôle de gardienne du droit à la protection des données personnelles et de la vie privée des individus.
La commission encadre la mise en conformité de l’application par rapport au RGPD (règlement général sur la protection des données).
Depuis sa mise en œuvre, TousAntiCovid a fait l’objet de 8 délibérations par la CNIL.

Une acceptation du dispositif, mais sous certaines conditions…
La CNIL n’émet pas de contre-indication au déploiement de cette application, dès lors que celle-ci garantit la mise en application du protocole ROBERT, dans une logique d’anonymisation et de minimisation des données collectées.
La CNIL émet des recommandations qui encadrent l’application TousAntiCovid et effectue des contrôles afin de garantir la pleine application de ce protocole.
…qui ne lui empêche pas d'émettre des réticences
L’atteinte portée au droit à la vie privée et à la protection des données personnelles doit être justifiée par un motif d’intérêt général et proportionnée à la réalisation de cet objectif. La CNIL cherche ainsi à récolter des preuves auprès du gouvernement afin de juger et d’évaluer l’efficacité de l’application.
Elle demande également une démonstration que la mise en place de ces outils ne rentre pas dans un “solutionnisme technologique ”, qu’elle n’a toutefois pas obtenu depuis la mise en place de l’application.
Plus encore, la CNIL est inquiète de voir dans le futur une banalisation de ce type de dispositifs attentatoires à la vie privée.
La Commission rappelle que la multiplication des dispositifs numériques mis en œuvre dans le cadre de la gestion de l’épidémie rend absolument nécessaire une évaluation quantifiée et objective de leur efficacité dans la contribution à la lutte contre la COVID-19, ce qu’elle a rappelé à de nombreuses reprises depuis le début de l’épidémie, afin de s’assurer que le recours à ces dispositifs prendra fin dès que cette nécessité aura disparu. Or, la Commission « regrette qu’à ce jour, les études et évaluations demandées de façon réitérée ne lui aient pas été transmises ».
CNCDH : lanceur d’alerte concernant TousAntiCovid
La CNCDH a un rôle de vigilance, de proposition, de suivi et de sensibilisation auprès du Gouvernement et du Parlement sur tous les sujets relatifs aux droits de l’Homme et au droit international humanitaire.
Cette institution ne cesse de rappeler qu’une conformité au RGPD n’est pas suffisante pour la garantie totale du respect de l’ensemble des droits et libertés fondamentaux. C’est en ce sens qu’elle se soucie des potentielles conséquences de l’application TousAntiCovid vis-à-vis des libertés et droits de l’Homme.
La CNCDH a alerté à plusieurs reprises les pouvoirs publics sur les dangers que représentent les applications de contact tracing. Pour la CNCDH, il s’agit donc d’une atteinte disproportionnée aux droits et libertés de l’ensemble des citoyens.
Au sens plus large, la commission s’est tenue de rappeler que l’utilisation de nouvelles technologies ne pouvaient se substituer à une nouvelle politique de santé ambitieuse et a donc appelé le Gouvernement et le Parlement à réévaluer la nécessité de cette application de suivi numérique des personnes dans le cadre de la lutte contre la Covid-19.

TousAntiCovid : atteinte à la cohésion sociale !
Pour la CNCDH, si l’objectif premier de l’application est de protéger la santé des individus, celui-ci n’est pas atteint, puisqu’en voulant protéger la santé physique, ils attaquent la santé mentale. TousAntiCovid pourrait susciter de l’anxiété, de la stigmatisation et des discriminations à l’égard des personnes contaminantes ou contaminées ou de celles qui refuseront d’installer l’application.
C’est en ce sens que la CNCDH accuse les pouvoirs publics de fragiliser la cohésion sociale à travers l’application. Plus encore, la commission rappelle que la population n’est pas égale en termes d’accès au numérique et que TousAntiCovid vient creuser davantage l’écart existant.
Une application inefficace !
La CNCDH affirme qu’il faut 60% d’utilisateurs au minimum pour que TousAntiCovid soit efficace. Pour la CNCDH, l’application ne fonctionne pas car un nombre insuffisant de personnes l’ont téléchargée, puisqu’il est inférieur au nombre qu’ils ont annoncé. Plus encore, très peu d’entre eux ont activé la fonction bluetooth.
L’utilisation des technologies pour lutter contre la pandémie laisse à la marge une partie de la population. La CNCDH affirme que 18 millions de Français ne possèdent pas de smartphone et se retrouvent exclus du processus de l’application. Elles ne bénéficient donc pas de la même protection que le reste de la population. Ces personnes sont généralement des personnes âgées ou à faible revenu, soit des personnes vulnérables face à la maladie.
Enfin, pour la commission, TousAntiCovid viendrait accentuer le nombre de dysfonctionnement notamment s’agissant des cas de faux positifs et faux négatifs. Ce qui remet en question la fiabilité de l’application d’autant plus que le modèle de transmission du virus est incertain.
TousAntiCovid : un affront au droit à la protection des données personnelles !
Pour la CNCDH, les applications de contact tracing comme l’application TousAntiCovid sont dangereuses au regard de la vie privée. Bien que celle-ci se fasse sur la base du volontariat et de l’anonymat, les dérives n’en sont toutefois pas écartées. D’autant plus que le bluetooth ne représente en aucun cas un indicateur fiable de contamination et présente au surplus différents risques de sécurité et de détournement des données personnelles.
Pour la commission, l’utilisation de l’Intelligence artificielle et des données personnelles traduit davantage un acte de surveillance des individus et donc d’une atteinte aux droits et libertés fondamentaux.
La CNCDH estime que l’application StopCovid, d’efficacité incertaine, porte, dans ses modalités d’accès et d’utilisation, une atteinte manifestement disproportionnée aux droits et libertés de l’ensemble des citoyens.
La Quadrature du Net : données personnelles sacrifiées

Dès l’annonce de ce projet d’application, l’association de défense et de promotion des droits et libertés sur Internet, a pris fermement position sur le sujet. Ils remettent en question l’utilité de cette méthode pour mettre fin à la pandémie.
L’association émet un véritable signal d’alerte : “StopCovid serait inutile, dangereuse pour nos libertés et pourrait même aggraver la situation sanitaire. L’administration et le Parlement doivent cesser d’investir toute ressource humaine ou économique dans ce projet vain et dangereux. L’urgence est partout ailleurs.”
Afin d’apporter des justifications à leurs propos, l’association a fait appel à trois informaticiens pour réaliser une analyse de risques de cette application. Selon eux, TousAntiCovid ne remplirait pas ses promesses concernant l’anonymat et la protection de la vie privée des utilisateurs puisque beaucoup de statistiques d’utilisation seraient collectées et envoyées au serveur.
De fait, ils font un lien fort entre l’application et sa dangerosité pour la société et les libertés des individus, en qualifiant son efficacité de “hasardeuse”, et en allant jusqu’à parler de “libertés inutilement sacrifiées”.
TousAntiCovid : “une efficacité hasardeuse” !
De la même manière que la CNCDH, la quadrature du net juge l’application TousAntiCovid inefficace. Toutefois, pour cette association, ce n’est pas 60% mais 80 à 100% de la population qui devrait utiliser l’application pour qu’elle fonctionne. À cela, la quadrature du net met en avant la méconnaissance d’une partie de la population quant aux pratiques numériques sur smartphone.
Au-delà de ces différents aspects, l’association évoque les difficultés technologiques notamment quant à la précision du champ de détection du Bluetooth. Celle-ci étant variable d’un appareil à l’autre, elle n’offre donc pas des résultats fiables. Cette pratique à travers le bluetooth augmente massivement le sentiment de défiance, de la part de la population, à l’égard de l’Etat. Ceci a pour effet que certaines personnes malades en viendraient à cacher leurs symptômes aux services de santé, par peur des conséquences que cela pourrait avoir sur leur vie.
“Des libertés inutilement sacrifiées”
Pour la Quadrature du Net, “l’objectif de l’application “alerter des personnes ciblées” est par essence incompatible avec la notion juridique d’anonymat – il s’agit au mieux d’un pseudonymat, qui ne protège pas contre tout type de surveillance individuelle”.
Selon l’association, les données aussi sensibles que l’application engendre, nécessiteraient que l’on ait à donner notre consentement, et que les informations fournies soient facilement compréhensibles pour “permettre un consentement libre, spécifique, et éclairé”. Pour la Quadrature, TousAntiCovid est alors une atteinte directe aux libertés individuelles, au droit à la vie privée et à la confidentialité des données de santé.
La Quadrature avance un second argument : TousAntiCovid vient consolider la certitude que la technologie ainsi que le tracing ne sont pas la solution à la crise sanitaire. Les applications éloignent l’attention de mesure qui pourrait avoir un réel impact sur la pandémie comme par exemple la recherche scientifique. La Quadrature du Net est en ce sens inquiète face au solutionnisme technologique que le gouvernement promeut.
L’utilisation d’une application dont les objectifs, les techniques et les conditions mêmes d’usage portent des risques conséquents pour notre société et nos libertés, pour des résultats probablement médiocres (voire contre-productifs), ne saurait être considérée comme acceptable pour nous – tout comme pour beaucoup de Français·es.
Et qu’en pensent les personnes publiques ?